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La musique ou toutes les formes de l'amour

Alors que je rentrais dans ma salle de cours à Vienne, jeune étudiante chez un mentor russe, je croise un camarade polonais venant jouer juste avant moi son Scherzo de Chopin au dit mentor. Et tandis que nous attendions le maître, je lui demande comment il va. Il me rétorque, façon pianiste, laissant balader ses mains sur le clavier, combien cette œuvre est belle et qu’il l’aime, aussi difficile soit-elle. Mais, ajoute-t-il, avec l’humour polonais : « je ne suis pas sûr que Chopin, lui, m’aime ! » ...


Cette anecdote m’est restée, avec l’éclat de rire qui l’accompagnait, comme une vraie question qu’il nous arrive plus souvent qu’on ne le croit de se poser : « suis-je aimé(e) ? » Cette question qui semble un peu naïve, un peu « jeune adolescent » est en fait un dérivé d’une question plus fondamentale qui serait : « me sens-je aimé(e) ? » Car bien sûr il n’est question que du sentiment que l’on s’offre à soi-même de vivre – ou non. Et plus qu’un sentiment, je dirais une révélation. Celle de qui nous sommes, véritablement.


Souvent nous croyons ne pas aimer assez, chercher à aimer plus, ne pas savoir aimer… Et nous oublions que dans les deux mouvements de l’inspire et de l’expire, il y a aussi ces deux mouvements de notre être à « la source » (appelez ce sentiment de Vie comme vous le voudrez) : parfois nous allons vers, nous cherchons à nous relier, à accéder à « la source », d’autres fois, c’est l’élan inverse qui se produit, ce qu’on appelle « touché par la grâce ».


LES DEUX MOUVEMENTS DE VIE


En d’autres mots, il y aurait le mouvement de donner et celui de recevoir. Le deuxième étant peut-être moins conscientisé que le premier. Car il ne fait pas appel aux mêmes mécanismes en nous. Il nous déroute. Dans « recevoir », que puis-je faire ? Rien ! Recevoir. Notre société nous a habitué au premier mouvement, celui qui fait et qui agit (donner) pour expérimenter quoique ce soit. Cette énergie Yang nous demande sans doute, en cette période de mutation, à s’équilibrer d’avantage avec notre énergie Yin, moins explorée en tant que force puissante (et plus active qu’on ne le croit) du « recevoir ».


En hébreux, le mot « Kabel » qui est à l’origine de la Cabale (commentaires de textes religieux juifs), signifie « recevoir ».


Mais, me direz-vous-vous, que puis-je recevoir quand je me sens vide, en manque de quelque chose ?! Voilà en réalité le vrai moment propice pour recevoir.


Le vide est un plein qui s’ignore.


Car une fois le « recevoir » ressenti, s'en vient une autre étape essentielle, comme le mouvement de l’air dans nos poumons et l’intelligence sophistiqué de notre cœur pompant l’oxygène pour se diffuser dans tout notre corps. Cette étape est celle de l’accueil.


Lorsque je reçois quelque chose d’agréable, à combien suis-je capable de l’accueillir ? 5% ? 60% ? 100% ? Cet accueil n’est que celui de moi à moi. Ce n’est pas l’accueil d’un objet en réalité, mais celui du sentiment d’amour (peu importe la forme qu’il prendra) envers moi-même. Parfois le corps, paradoxalement, se tend lorsqu’il est face à l’amour. De peur, de nervosité, d’inhabitude…


Comme la chaise ou le fauteuil m’accueille, puis-je accueillir toute expérience en moi, comme au creux d’un cœur aimant ?


Alors je réalise que, tout conspire à me faire expérimenter que, fondamentalement, je suis aimée. Et voilà peut-être l’ultime moment qui se produit généralement en séance d’hypnose, dans l’intimité de chacun, dans sa connaissance aussi infinie qu’indicible de ce qui le parcourt en cet instant.


L'amour prend parfois de drôles de formes ! Faut-il pour autant le refuser ?


Et en d'autres termes, pour conclure sur ce début de suggestion à soi-même : qu'est-ce qui pourrait bien me faire croire que je ne suis pas aimé(e) ? Ai-je conscience que j'ai choisi, d'une façon ou d'une autre, de me faire vivre cela dès l'instant où je me fais croire à l'absence plus qu'à la présence, celle de l'amour envers moi-même ?


En ce passage de Pessah et de Pâques, entre résurrection chrétienne et libération du verbe au sortir de l’Égypte par les Juifs, je n’ai qu’une invitation à vous partager sous le soleil chaud de ce printemps qui renaît à lui-même, perpétuellement : revenir justement à cette étymologie de « Pessa’h », celle du passage ou peut-être du pas-sage… !


Que ce fut dans l’amour que vous recevez, que vous accueillez ou que vous donnez, il n’est qu’une joie et une sagesse : celle de l’instinct de vie.


Joyeux passage d'avril à mai !


De tout coeur à vous,

Hélène Tysman



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